jeudi 21 juin 2012

Madagascar : L’illusion de réussite dans un environnement d’échec

 

Depuis quelques temps, je me réunis avec quelques amis issus de différents secteurs tels que bancaire, administratif ou tout simplement de simples citoyens qui ont envie de bavarder dans un cadre informel. On a même trouvé un nom à notre collectif –> Les DESABUSES… On parle de politique, d’économie, de la meilleur bière et des nouvelles clopes Boston qui ont un gout exécrable par rapport aux anciennes…

C’est dans une de ces discussions qu’on a parlé de la réussite des jeunes et de leurs premiers pas dans le monde du travail ou de l’entreprise. La plupart des intervenants se sont accordés que Madagascar est le pire endroit qui existe pour que les jeunes puissent décoller de bon pied. Tous les aspects de la réussite sont soient corrompus ou trop chers pour les faibles moyens des jeunes.

Le premier écueil est la formation. Malgré les promesses des nouvelles technologies et des nouveaux métiers qui se profilent, la formation est inexistante. On parle ici d’une formation qui couvrirait le sujet de A à Z. La plupart des soi-disant centres de formation ne sont tenus par des utilisateurs expérimentés qui prennent le titre de professeur. Par ailleurs, les filières professionnelles qui existent dans les facultés et les universités sont déjà touchées par la corruption et le racket. L’un des intervenants a même avoué qu’il avait acheté son diplôme d’études supérieures !

Quand le jeune termine cahin-caha sa formation, il reste l’immense obstacle du financement. L’un des membres qui est gestionnaire de clientèle dans une banque privée a confirmé qu’il ne comptait plus les rejets quotidiens sur des dossiers de prêt parce que le jeune n’avait aucune garantie sur la rentabilité de son entreprise. La procédure est parfois tellement complexe qu’il faut attendre des mois avant d’obtenir une somme de 2 millions d’Ar et on sait que ce n’est rien quand on lance une entreprise. D’autres ont argués que l’accès au crédit a été facilité par les entreprises de microcrédit telles que MicroCred, mais les choses sont loin d’être aussi roses pour les jeunes avec le microcrédit. Le banquier a expliqué que la demande de prêt était beaucoup plus facile chez ces organismes, mais le taux d’intérêt était tellement élevé qu’on pouvait le comparer à un usurier qui exploiterait les jeunes.

Ensuite, un troisième membre a expliqué que tout cela n’est que l’aspect technique de la réussite des jeunes. Mais il y a aussi l’environnement social et religieux qui empêche parfois le jeune de s’épanouir. On lui martel la tête que sa destinée est écrite dans la banalité et la médiocrité et qu’il serait chanceux s’il arrivait à survivre dans ce pays. “ En gros “ a-t-il affirmé, “ C’est parfois la famille et les amis qui vous tirent vers le bas malgré eux ”. Il est important pour un jeune de s’émanciper de son environnement familial et de ses amis pour trouver ce qui l’attend. S’il ne fait que suivre le mouvement de son environnement, alors il ne sera qu’un individu lambda.

Si le financement, la formation et l’émancipation sont des obstacles surmontables, la corruption est bien la pire ennemie des jeunes entrepreneurs. Chaque petit papier vous coutera les yeux de la tête et il faut payer les inspecteurs du fisc pour qu’ils ne vous assomment pas avec des délits imaginaires. Il faut payer la police pour qu’elle soit plus coulante. Il arrive même que la concurrence paye les forces de l’ordre pour vous emmerder pour des broutilles. En fait, il est même impossible pour un jeune de réussir son entreprise s’il utilise la voie légale.

Dans ces conditions, on peut parler de ces conférences, ces colloques et toutes ces simagrées sur le développement économique, mais les problèmes de fond ne sont pas résolus et personne ne veut s’atteler à cette tâche parce que tout le monde bouffe au passage. Quand les jeunes voient tous ces obstacles, il n’est pas étonnant qu’ils choisissent la voie de la facilité avec l’illégalité ou tenter leur chance dans des émissions débiles de télé-réalité pour devenir une star. La corruption et les nombreuses lacunes et dérives du secteur économique font qu’ils choisissent la médiocrité absolue quitte à avoir une survie et non une vie.

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