samedi 22 novembre 2008

L'islamisme

L’islamisme est un fondamentalisme religieux en ce qu’il prône un retour à la lettre du Coran : les comportements des musulmans doivent obéir aux préceptes établis par le livre sacré et, pour les sunnites, par la sunna (coutume établie au regard des actes du Prophète) et les hadith (paroles et commentaires du Prophète). Partisans d’une société égalitaire, les islamistes se réfèrent à l’umma, la communauté des croyants. À leurs yeux, la religion doit englober tous les aspects de la vie quotidienne, qu'elle soit le fait des individus ou des institutions, c'est-à-dire l'État.

Cette irruption du politique dans le religieux prend des formes différentes en fonction des circonstances géopolitiques et selon qu'elle s'exerce en milieu sunnite (Frères musulmans d'Égypte, Front islamique du salut en Algérie) ou dans la mouvance chiite (khomeinisme en Iran, Hezbollah au Liban). En outre, l’islam militant, qui connaît une forte radicalisation depuis les années 1970, recouvre une grande variété de doctrines et d’objectifs, allant de la seule défense de la morale religieuse au combat politique pour la conquête du pouvoir et l’instauration d’un État islamique, voire à la violence armée et au terrorisme.


Puissance du wahhabisme

Les principaux mouvements extrémistes sunnites actuels plongent leurs racines dans le wahhabisme, mouvement de contestation puritain fondé au milieu du XVIIIe siècle en Arabie par Muhammad ibn Abd al-Wahhab. Le wahhabisme rejette le chiisme comme hérétique et prône un retour à un islam pur contre l’islam populaire ottoman. Adopté en 1744 par la famille des Saoud, il accompagne leur mouvement de conquête de l'Arabie. À partir des années 1970, l'argent du pétrole permet à l’Arabie saoudite, gardienne des lieux saints de l’islam, d'implanter dans plusieurs pays musulmans d'Afrique et d'Asie cette idéologie qui récuse toute interprétation du Coran autre que littérale (financement de mosquées, d’écoles coraniques, de réseaux caritatifs, de groupes activistes, etc.).

Influence des Frères musulmans

En 1928, Hassan al-Banna fonde en Égypte l’association religieuse des Frères musulmans. Face aux percées de la laïcisation et à l'influence du marxisme, ce mouvement lutte pour la ré-islamisation de la société. Le recours à la violence est alors légitimé par la nécessité de soumettre l’État, lieu de la corruption, à un pouvoir religieux idéalisé. Dès 1945, les Frères musulmans commettent les premiers attentats contre un gouvernement arabe. Après que les partis nationalistes ont pris le pouvoir dans le monde arabo-musulman décolonisé, les groupes radicaux se multiplient dans les années 1970. En Égypte, en Syrie et en Jordanie, leur action vise à ébranler les représentants d’un nationalisme arabe ayant montré son incapacité à vaincre Israël (guerre des Six-Jours en 1967, guerre du Kippour en 1973). En 1981, le président égyptien Anouar al-Sadate est assassiné par des extrémistes islamistes. En 1983, le Djihad islamique, branche armée du mouvement chiite Hezbollah (le « parti de Dieu »), commet des attentats-suicides contre les marines américains et les soldats français de la Force d’interposition des Nations unies au Liban (Finul).


Chiisme révolutionnaire et néofondamentalisme

Dans l'Iran chiite, le triomphe de la révolution islamique, en 1979, catalyse les aspirations nationalistes autour d'un projet de ré-appropriation culturelle par la religion. Durant les décennies 1980 et 1990, le retour à l’islam et la tentation du repli identitaire sont favorisés par la crise socio-économique, l’occidentalisation des modes de vie dans la plupart des pays musulmans et la mondialisation de l’économie. Les islamistes cherchent à conquérir l’opinion publique des pays musulmans en menant une action sociale auprès des laissés-pour-compte et en dénonçant la corruption des élites occidentalisées. D’une efficacité limitée, les réseaux d’entraide destinés à remédier au chômage et à la pauvreté, ainsi qu’aux défaillances des services sociaux, contribuent cependant à maintenir leur influence, notamment auprès des jeunes, premières victimes de la crise économique.

La révolution islamique en Iran offre un contre-modèle au schéma occidental dominant tandis que l'effondrement de l'Union soviétique et d'un modèle socialiste de développement qui avait soulevé quelque espoir auprès d'une jeunesse en plein essor démographique contribue amplement, de son côté, à faire de l'islamisme radical une alternative crédible. Ainsi, dans le monde sunnite qui regroupe près des neuf dixièmes des musulmans, des groupes ultra-conservateurs remettent-ils au goût du jour d'anciens théoriciens légitimant la violence contre les modernistes, les femmes et les étrangers. Dans ce « néofondamentalisme » qui s’affirme à partir de la fin des années 1980, le rigorisme religieux est lié à la lutte armée.

Du Djihad antisoviétique à la guerre sainte contre l’Occident

L’Afghanistan, après son invasion par les troupes soviétiques en décembre 1979, devient le lieu de la résistance des combattants islamistes, soutenus par les États-Unis, l’Arabie saoudite et le Pakistan, puis le principal théâtre du néofondamentalisme. Des milliers de volontaires de toutes origines répondent alors à l’appel du djihad (« la guerre sainte ») antisoviétique. À l’instigation du milliardaire saoudien Oussama Ben Laden, l’un des principaux responsables du recrutement, de l’acheminement et de l’entraînement des volontaires islamistes, le réseau Al Qaida, constitué de vétérans, se met en place à l’issue de la guerre d’Afghanistan. Mouvement clandestin financé par son initiateur et les fonds de riches donateurs, Al Qaida utilise la pratique traditionnelle de la hawala fondée sur la confiance réciproque qui évite tout transfert de fonds pouvant laisser des traces écrites.

Lors de la guerre du Golfe, alors que la monarchie saoudienne autorise le déploiement des troupes américaines en Arabie saoudite, terre musulmane sacrée, le djihad se retourne contre les États-Unis. L'Arabie saoudite n'étant plus considérée par les fondamentalistes comme un pays privilégié par sa rigueur en matière religieuse, les mouvements radicaux se déplacent vers des pays plus favorables à leur expansion militante : le Soudan du chef spirituel Hassan al-Tourabi, où se déroule une guerre d'islamisation contre les chrétiens du Sud ; l’Algérie, où l’annulation des élections législatives de 1992 qui avaient porté au pouvoir le Front islamique du salut (FIS) a entraîné une guerre civile ; le Pakistan, où des madrasas (écoles coraniques) dispensent un enseignement radical encouragé par les autorités, et surtout l’Afghanistan, pays montagneux ravagé par vingt ans de guerre, où les conditions sociales et économiques sont réunies pour installer le régime prôné par les partisans d'un retour à un islam des origines ou supposé tel (taliban).

Montée du « djihadisme » international

Après la guerre du Golfe, les États-Unis deviennent la cible de la guerre sainte contre l’Occident : attentats du World Trade Center à New York en 1993, contre des ambassades américaines au Kenya et en Tanzanie en 1998, ou dans les pays du Golfe persique. Parallèlement, les Groupes islamiques armés (GIA) exportent la guerre civile en commettant plusieurs attentats sur le sol français en 1995 et 1996.

Le terrorisme islamiste atteint son paroxysme lors des attentats dévastateurs du 11 septembre 2001 contre les États-Unis. Après la déclaration de guerre du président américain George W. Bush contre le terrorisme international, le régime des talibans en Afghanistan, censé abriter Al Qaida, est renversé. L’organisation islamiste ayant une structure des plus informelles, des attentats continuent d’être perpétrés contre les intérêts occidentaux par des groupes terroristes agissant dans sa mouvance idéologique (attentat meurtrier contre une discothèque à Bali, fin 2002, notamment) sans que les filières puissent être complètement remontées.

Cette radicalisation violente ne doit pas occulter la possibilité d’un islamisme politique non révolutionnaire dont l’ambition est de s’intégrer aux systèmes politiques en place dans un cadre légal — c’est le cas par exemple en Turquie. En outre, la lutte armée ne peut être totalement appréhendée qu’au regard de la répression exercée par des régimes autoritaires sur des mouvements islamistes recueillant de plus en plus de suffrages auprès de la population — le cas de l’Algérie est sur ce point exemplaire.

Les Questions sont les réponses à l'ignorance !!

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